Dans la dynamique des Forums Internationaux pour le Bien Vivre (2018 puis 2022), ce Manifeste invite chacun.e à s’engager, chacun.e à son niveau, afin d’accélérer le changement de boussole dont les crises récentes ont conforté l’impérieuse nécessité.

Il s’agit de traduire en actes et en indicateurs le bien vivre, entre plafond environnemental et plancher social et de nourrir la communauté des acteurs et actrices de ce changement.

Ce Manifeste pourra servir de référence pour de futurs échanges, travaux autour des indicateurs de richesses. Il pose le contexte des enjeux actuels, fait état de ce qui existe en terme d’outils d’évaluation et de pilotage à ce jour, et présente les défis qui restent à relever.

MANIFESTE

Prendre le cap du bien-vivre : 

compter ce qui compte

Un modèle économique basé sur une croissance infinie dans un monde fini n’est pas viable. Année après année, les dérèglements écologiques, sociaux et économiques sont devenus systémiques et ils s’intensifient.

Tout indique qu’il y a nécessité et urgence à un changement radical des modes de consommation et de production. Les rapports du GIEC sonnent l’alerte. Les épisodes climatiques extrêmes, de plus en plus fréquents, impactent directement la vie de très nombreux citoyens, sur toute la planète.

Les inégalités sociales sont d’autant plus insoutenables que ce sont les personnes les plus précaires qui subissent le plus fortement l’impact des dérèglements environnementaux : exposition aux risques, inégalités d’accès aux services et aux ressources, inégalités de santé. Pourtant leur mode de vie impacte bien moins le climat que celui des populations les plus aisées.

Nous refusons le fatalisme et la sidération. Partout, des personnes, des collectifs, des collectivités recherchent, imaginent et mettent en œuvre, à leur échelle, de nouveaux récits, des actions de transition et de transformation pour cheminer vers un monde socialement juste et écologiquement soutenable.

La crise sanitaire et la pandémie ont fait resurgir, avec force, la question de « ce qui compte vraiment », la nécessité de changer de modèle. Elles ont aussi mis en évidence l’extraordinaire capacité de coopération des êtres humains pour faire face et surmonter les difficultés.

Se doter d’outils pour l’action

Dans ce contexte, nous devons nous saisir des outils de mesure et de pilotage qui répondent aux enjeux sociaux et environnementaux auxquels nous sommes confrontés ; et nous affranchir d’outils comptables et économiques trop focalisés sur le court terme.

Les indicateurs sont des boussoles nécessaires pour orienter nos actions et nos politiques vers le bien-vivre pour tous et pour la planète. Ils ne peuvent être le seul fondement du projet de société, mais ils peuvent contribuer à le dessiner. Outils d’information et de pilotage, ils façonnent le réel et structurent notre vision du monde en nous montrant la direction à regarder.

Ce travail ne peut se faire que par un processus associant l’ensemble des citoyens et citoyennes, toutes les parties prenantes de la société, avec une vraie place donnée aux minorités et personnes marginalisées. Il s’agit en effet d’établir une nouvelle convention sociale et politique par la définition de « ce qui compte » et ce qu’on doit compter.

S’appuyer sur ce qui existe, aller plus loin

Des indicateurs alternatifs aux seuls indicateurs économiques existent et sont une ressource pour l’action.

Quand nous utilisons des indicateurs mieux ajustés, ils permettent de révéler des situations invisibles jusque-là, prioriser l’essentiel et agir au plus près des besoins.

Les territoires sont des espaces d’action privilégiés. Ce sont des lieux vécus d’un point de vue matériel, politique, symbolique et relationnel. Ce sont aussi des espaces où l’action demeure possible et ancrée, dans un contexte où les mesures prises à l’échelle globale pour répondre aux enjeux socio-écologiques sont insuffisantes.

Dans de nombreux territoires, le cap du bien-vivre est pris. Aller plus loin suppose de dépasser deux écueils actuels :

Répondre aux seuls symptômes des crises en cours ne suffit pas. Il nous faut considérer les interdépendances à plusieurs niveaux : les interdépendances sociales, économiques et écologiques ; les interdépendances entre les personnes et les collectifs ; les interdépendances entre le niveau local, national et global ; et les interdépendances entre les générations présentes et futures.

Pour le moment, prendre en compte ces interdépendances pose une vraie difficulté. Les indicateurs actuellement développés intègrent mal ces interdépendances et le risque est d’arriver à une juxtaposition des expertises et des indicateurs ne permettant pas d’appréhender la complexité des situations et de concevoir des réponses transversales adaptées aux enjeux.

Répondre aux seuls besoins des êtres humains ne suffit pas. Les enjeux de préservation de la planète – de la biodiversité, de la qualité des sols, de l’air, des eaux – doivent nous mener à mieux intégrer les indicateurs de limites, de seuils et de bon fonctionnement écologique. Cela suppose de prendre la pleine mesure de notre relation à une « nature » qui, elle aussi, a des droits.

S’engager

Les signataires, dans la dynamique des Forums Internationaux pour le Bien Vivre (2018 puis 2022) s’engagent à tout mettre en œuvre, dans leurs actions, sur leur territoire et en lien avec l’ensemble des acteurs et actrices qui le font vivre, citoyen·ne·s, associations, entreprises, recherche, acteurs publics, pour :

  • Articuler et penser ensemble les enjeux sociaux et environnementaux et les différentes échelles d’action : choisir des boussoles qui permettent de prendre en compte nos interdépendances ;
  • Définir collectivement des seuils de soutenabilité sociale et environnementale et se doter d’espaces de discussion démocratiques sur la manière dont ces seuils sont définis et pris en compte ;
  • Piloter en assumant le choix du bien-vivre, même s’il bouscule et s’il est parfois incertain et, pour ce faire, se doter d’outils d’observation, de prospective et d’évaluation afin de suivre la trajectoire collective ;
  • Dépasser l’enfermement dans le court terme au profit de stratégies de moyen et long terme et pour ce faire, relire chaque décision du quotidien à l’aune des 4 impacts : écologiques et sociaux, locaux et globaux ;
  • Tisser des alliances inédites entre acteurs, oser le lobbying de transformation, en interpellant d’autres décideurs, d’autres territoires ;
  • Continuer à chercher, innover, expérimenter et à partager ces expériences pour renforcer et nourrir un réseau des acteurs en recherche et des chercheur.es en action.

 

Le 1er juillet 2022

Que vous soyez élu.e.s, citoyen.nes, acteurs associatifs ou économiques en France ou ailleurs dans le Monde, vous pouvez signer ce Manifeste et vous allier à la communauté du Cap bien vivre.
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